LOTEKE LOSAMBO Laetitia

4eHumanités Pédagogiques

Née à Kinshasa, le 03 novembre 2000

Kinshasa, novembre 2015

 

 

 

 

Salut. Je m’appelle Laetitia Loteke Losambo. J’étudie aux Gazelles. Je suis en quatrième année des humanités pédagogiques. Je suis née le 03 novembre 2000, à Kinshasa, d’une famille de six enfants dont je suis la cinquième.

Les deux personnes qui ont marqué ma vie sont mes deux amies. Elles ne sont même plus des amies pour moi. Elles me sont devenues des sœurs. J’ai une grande estime pour elles. Ces deux filles sont Kipulu Syntiche et Bongondo Triphène.

Bongondo est mince, élancée. Elle a un petit nez. Elle est née le 17 juillet 1999. Elle est une fille sournoise. Elle sacrifie son bonheur pour les autres. Elle n’arrive pas à exprimer ses sentiments. Elle ne trouve sa consolation qu’en écrivant. Elle cache sa souffrance. Elle fait de son mieux pour mettre tout le monde à l’aise. Je la considère comme ma grande sœur. Elle est toujours là pour moi. Elle fait tout pour que je sois heureuse. Elle n’a pas toujours la meilleure façon de me prouver son amour, mais au fond de moi, je lis qu’elle m’aime. Elle a une influence positive sur moi. Elle m’aide à faire des choses et moi je fais de même. Je dis toujours aux gens qu’elle est ma complémentaire. Tout ce qui manque chez moi est en elle et tout ce qui manque chez elle est en moi. Nous avons les mêmes goûts, pensées, réactions, compréhensions. Elle est beaucoup attachée à Syntiche et à moi parce que nous comblons cette envie qu’elle a toujours eu durant sa vie : avoir une sœur.

Syntiche est née le 02 mai 2001. Elle n’est ni mince, ni grasse, mais moyenne. Elle n’est ni élancée, ni courte, mais elle a la taille moyenne. Syntiche, c’est une fille ouverte. Elle est notre petite sœur. Nous la considérons comme notre grande-sœur. Au lieu que nous trouvions des solutions à ses problèmes, c’est plutôt le contraire. Elle est la source de mes forces. Chez elle je retrouve du réconfort. Je la considère comme ma mère, parce que, jusque-là, je ne me souviens pas d’un moment que j’ai passé, assise à côté de ma mère, en train de suivre ses conseils. Mais elle, elle m’accorde ce temps. Elle est la solution à mes problèmes. Elle représente la douceur, la compréhension. Elle est la force de ma vie. Sans elle j’aurais encore beaucoup d’équations sans solutions. Quand je lui parle de mes problèmes, je sens que je suis en lieu sûr et je confie mes problèmes à une bonne personne. La confiance que j’ai en elle, est plus forte que la confiance que j’ai envers les membres de ma famille. Nos liens sont plus forts que les liens du sang. J’ai appris à l’aimer malgré ses défauts. Elle m’a appris ce que c’est que faire confiance.

Avec Tryphène nous nous sommes connues aux Gazelles en première année secondaire. Elle avait repris la classe. En première je n’étais pas attachée à elle. Elle était ma pire ennemie. On avait deux groupes. Notre groupe et le leur. Dans notre groupe il y avait beaucoup de filles et leur groupe ne comptait que trois personnes : Nguni’n, Makaya et elle. A cette époque, on l’appelait Tryphène la loquace. Elle parlait trop. On se disputait pour tout et pour rien. On les insultait. Une fois, nous nous sommes disputées pour une bêtise. C’était parce que nous on mangeait et on ne leur donnait rien. Ça leur faisait mal au cœur. Elles nous toisaient, surnommaient et tout ça nous énervait. Nguni’n et Makaya étaient nos amies en sixième primaire mais quand elles sont devenues amies à Tryphène, leur comportement avait changé et on avait conclu que c’était elle qui avait une influence négative sur elles. En deuxième, notre relation s’était un peu améliorée. C’est là que j’ai connu Kipulu. Elle s’est inscrite aux Gazelles en deuxième secondaire. Elle aussi s’était intégrée dans le groupe de Nguni’n. Elle m’énervait. Je détestais tout leur groupe. Avec Kipulu, on ne s’est jamais disputée mais elle a connu toutes sortes d’insultes, devant eux, on faisait semblant de les aimer et devant nous, elles aussi, faisaient la même chose.

Tryphène racontait à tout le monde que j’avais déjà avorté, j’avais le SIDA. Elle avait sali ma réputation.

En troisième secondaire, Nguni’n et Makaya étaient parties dans une autre école. Elles étaient restées à deux : Bongondo et Kipulu les quatre fantastiques s’étaient séparées. Moi, ma meilleure amie était Jeannette Alonabi, mais je leur parlais quand-même. Tryphène venait chez nous et quand ma tante me demandait pourquoi je ne l’aimais pas, je lui disais qu’elle est une peste, méchante, hypocrite, profiteuse. Elle vient chez moi juste parce que ses amies sont parties. Elle aussi, elle pensait la même chose de moi. Tellement que je tiens trop à ma réputation, sans aucune idée de devenir son amie, je voulais juste lui prouver que moi au moins, je n’ai pas de prix, je ne suis pas une profiteuse. Sans le savoir, mon envie de lui prouver ma personne nous a attirées. Je n’étais pas trop attachée à Syntiche parce qu’elle ne faisait pas partie de mes soucis.

J’ai appris à connaître Tryphène. J’ai découvert ses défauts et ses qualités. Sans qu’on le remarque, on commençait à devenir des amies. Une fois elle m’a confié un problème, sans que je le lui demande. D’elle-même, elle est venue me dire. Ce phénomène m’avait étonné. Je me demandais comment je vais commencer à l’aimer trop. Après je lui ai posé la question pourquoi elle me faisait maintenant confiance, alors qu’on se détestait. Elle m’a répondu : « Je ne sais pas mais près de toi je me sens écoutée et comprise ». Elle venait chez nous. On faisait les devoirs, on riait. Puis un jour, j’ai découvert son secret en lisant son journal intime. C’est à partir de là qu’elle a commencé à me confier ses secrets banals ; les importants, elle les disait à Syntiche, c’est normal parce qu’on ne se faisait pas trop confiance. Il y avait encore des doutes dans notre relation. Après, j’ai appris à connaître Syntiche. Elle n’était pas la Syntiche que je croyais, celle que j’avais trouvée était douce, gentille, sûre d’elle, une confidente, elle était la personne idéale à qui on pouvait se confier. Elle était différente de la Syntiche que j’imaginais. Notre passé d’innocentes filles était peut-être lié à notre âge.

Tryphène ne me faisait pas totalement confiance. Elle préférait se confier à Syntiche plutôt qu’à moi. Il n’y avait pas de transparence entre nous. On se cachait des trucs tandis qu’avec Jeannette, il y avait la différence. On se disait tout. Il y avait une totale transparence. Je ne voulais pas quitter Jeannette pour Tryphène et Syntiche et je ne voulais pas quitter Tryphène et Syntiche pour Jeannette. Je me disais « est-ce qu’elles trois ne peuvent pas être mes amies à la fois ? ». Mais c’était impossible parce que Jeannette voulait que je passe plus de temps avec elle et Tryphène voulait la même chose. Les rassembler serait une bombe à retardement. Je ne voyais pas comment être amie à toutes les trois à la fois. Peu à peu, je quittais ALONABI pour m’attacher à Tryphène et Syntiche. Moi je ne voulais pas perdre Jeannette pour ces deux pestes. Sans le vouloir, j’ai commencé à m’attacher à Tryphène et Syntiche. Ça me faisait mal au cœur parce que je me disais que j’ai trahi Jeannette ainsi que notre amitié. Je suis allée m’attacher à mes pires ennemies, mais de l’autre côté, ce sentiment qui m’alliait à Tryphène était si fort que je n’arrivais pas à le briser. Une fois, elle n’était pas là et j’ai lu son journal intime.

Elle n’aimait pas que quelqu’un le touche. Je me disais « Mon Dieu comment va-t-elle réagir quand elle apprendra que j’ai lu son journal intime ? ». Quand elle est venue, je lui ai dit la vérité. Elle m’a juste dit qu’elle allait me le donner si je le lui avais demandé. Je me suis dit : « Ce n’est pas vrai. Elle me considère comme son amie ». J’ai tout fait pour gagner la confiance de Tryphène mais mes efforts ont été vains. Je me suis dit : « peut-être qu’on n’est pas faites pour être des amies, que je laisse tomber notre amitié ». On continuait à communiquer, elle venait aussi chez nous. Puis Jeannette a vu que je ne m’occupais plus d’elle comme avant. J’étais devenue beaucoup plus attachée à Tryphène. Elle s’est vite cherchée d’autres amies. J’ai tout fait pour regagner l’amitié de Jeannette mais je n’ai pas réussi. Elle avait fermé la porte de son cœur qui la conduisait jusqu’à moi. En essayant de gagner une amie, j’en ai perdu une autre. Je me sentais mal. Je disais « Et si Tryphène m’aimait par intérêt ? Ce qui veut dire que j’ai perdu Jeannette pour rien ! Et même si elle m’aimait, la place que Jeannette occupait dans mon cœur restera inoccupée. »

Je suis restée avec Tryphène. Vers la fin de la troisième secondaire, on a commencé à se faire un peu confiance.

En quatrième nous sommes devenues des MAPT (meilleures amies pour toujours) La transparence entre nous était devenue totale. Plus de secret à cacher l’une à l’autre, on se disait tout. Nous sommes devenues comme l’ongle et le doigt. L’une de nous deux est la raison et l’autre est le cœur. Et nous deux ne formons qu’un. Je dis toujours aux gens que notre amitié est une drôle d’amitié parce qu’il y a de cela quelques années, on ne s’aimait pas, on ne voulait même pas entendre parler de l’autre. On se haïssait, on s’insultait. Sans nous rendre compte nos insultes et autres malentendus nous ont rapprochées. Petit à petit sans le vouloir, nous sommes devenues amies. Elles ont su m’aimer, me comprendre, me protéger. Elles connaissent mes défauts comme mes qualités. C’est dans les moments difficiles qu’on reconnaît les vrais amis. Elles ont été avec moi dans mes joies, peines, tristesse et bonheur. Du jour au lendemain, tout s’est transformé. De nos rires est née notre joie. De nos peurs et pleurs est née notre confiance. De nos disputes sont nées notre assurance, notre complémentarité. De notre haine est née notre amitié. De tout ça est née notre amitié.

Maintenant on se parle sans peur ni crainte. Je me demande toujours comment ça s’est fait pour qu’on soit amies mais je n’ai jamais eu une réponse. Nous avons fait des choses plus petites que nos yeux mais plus grosses que le monde.

Elles ont marqué ma vie en tout. Elles m’ont appris beaucoup de choses. Elles m’ont appris que dans la vie, il ne faut jamais juger quelqu’un sans le connaître ; elles m’ont appris que la vie est une rose dont chaque pétale est une illusion et chaque épine une réalité. Grâce à elles, j’ai découvert le mot ami qui n’est plus une réalité abstraite.

Elles m’ont fait croire qu’il existe des amis à qui on est plus attaché qu’à un frère. Elles m’ont appris l’importance d’une sœur. Je suis une fille qui a grandi avec de la rancœur. Elles ont transformé cette rancœur en amour. Elles m’ont appris que si je ne pardonnais jamais, je ne verrais bientôt plus personne. Elles m’ont appris que le vrai bonheur coûte peu. S’il est cher, alors il n’est pas d’une bonne pièce. Elles m’ont appris que l’homme le plus heureux est celui qui fait le bonheur des autres. Elles m’ont appris qu’un obstacle au bonheur c’est de s’attendre à trop de bonheur. Elles m’ont appris que le succès n’est pas final. L’échec n’est pas fatal. C’est le courage de continuer qui compte. Elles m’ont appris à faire de ma vie un rêve et de mon rêve une réalité.

Elles m’ont appris à vivre sans regret, vivre sans une larme, vivre sans état d’âme, vivre sans s’arrêter, vivre pour tenter ma chance, vivre tous les instants, comme si c’était les derniers. Vivre tout au présent, vivre pour chanter les plaisirs de la vie. Vivre pour résister, vivre et jouir des plus belles victoires.

Ce texte est juste un moyen de les remercier d’avoir comblé ma vie de joie et d’amour pendant toutes ces années. Je garde l’essentiel, un respect de ce que je sais éternel. Je dois plus qu’un merci à celles qui ont su combler ma vie. Elles sont ma référence, ma première influence, les seules qui ont su me mettre en transe. Je vais mal en leur absence. Ce sont les amours de ma vie. Celles avec qui à jamais on n’est trahi. Celles qui n’ont pas de prix. Celles avec qui les peines n’ont plus aucun avenir. Je vois de l’espoir dans chacun de leurs regards. C’est à moi de les remercier cette fois. Les jours où le courage m’abandonne, elles sont là pour me soutenir.

Lorsque dans ma vie la joie résonne, elles sont toujours là pour me voir sourire. Elles resteront ma référence même dans le silence. C’est avec elles que j’avance. Au premier regard sans un mot, nous savions tous trois qu’une famille invisible nous réunit. Plus besoin de dire, nous sommes amies. C’est ainsi depuis tout le temps. Une émotion ? A peine. Pour moi, elles ont toujours raison et moi pour elles. Nous sommes prêtes à tout pour nous trois. Elles donnent, je donne, sans calcul. Pourquoi ? Pour ce plaisir léger, tenace, parfumé, discret, pudique. La vie, meilleure qu’elle-même. Je suis le soleil et elles la lune. Je suis les mots et elles la musique. Je suis le cœur et elles le rythme. Quand je les ai vues, j’ai tout de suite su que je pouvais leur faire confiance. Même dans l’absence, elles sont toujours si proches de moi.

On a grandi ensemble toujours à mes côtés. Il y a leurs mains. Si elles se sentent perdues, qu’elles disent mon nom, j’irai les chercher. On a grandi ensemble avec les rêves dans les yeux. On a changé et on s’est toujours relevé. Si elles ont besoin de quoi que ce soit, qu’elles comptent sur moi. Vous êtes celles que j’aime. Comme le riche et les mendiants, comme le passé et le présent, comme le jour et la nuit, comme la haine et l’amour, comme les pleurs et les rires, comme les forces et les peurs, je serai toujours là. Comme les regards de nos parents, comme une grande-sœur près de vous, je serai toujours là pour elles. Comme la tristesse et la joie, comme les parfums de notre enfance, comme la vie et le monde, comme l’enfer et le paradis, comme les pleurs et les sourires. Comme tout ce qui leur donne envie et qui peut leur appartenir. Comme toujours l’amour unit sans savoir où il nous mènera, je cherche le bien, j’évite le mal. Je reste sincère et je lève le voile. Nous sommes si différentes que l’amour reste là.

Si on s’aime, c’est parce qu’on s’aime tellement à en mourir. Je suis l’étoile qui les poursuit. Elles sont la toile de ma vie. Je serai toujours là pour elles. En essayant d’être leur amie, j’ai voulu m’éloigner à cause du désespoir. Mais regardez aujourd’hui, nous sommes si proches que personne n’arrive à y croire. Je les aime comme mes sœurs. Mes premières amours. J’ai partagé avec elle joies et peines. J’ai connu mes déchirures avec elles. C’est notre histoire à nous, je ne les oublierai jamais, non jamais. Elles sont au creux de moi, dans ma vie et dans tout ce que je fais. Même à l’autre bout de la terre, je continuerai mon histoire avec elles. Syntiche est mon sourire et Tryphène mon espoir. Sans une d’elles je n’imagine pas ma vie.

Au fond de moi, je garderai les souvenirs de notre amitié jusqu’à mon dernier soupir. Je prie Dieu que le jour où on est devenues amies reste inoubliable dans ma vie. Aussi longtemps que je vivrai, je les garderai dans ma mémoire. Elles sont celles qui me redonnent l’espoir. Je les aime trop.

Kinshasa, Novembre 2015

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